Le 7 décembre dernier, au terme de la présidence allemande du Conseil de l’Union européenne, les vingt-sept Etats membres ont adopté ses conclusions sur un label européen en matière de bien-être animal. Dans ce billet, nous revenons sur cette actualité qui marque une étape importante sur le chemin d’une meilleure régulation de l’information en matière de bien-être animal.

Pour rappel, le Conseil de l’UE est une des trois institutions de l’UE, aux côtés de la Commission et du Parlement. Il regroupe les représentants des vingt-sept Etats membres qui adoptent et négocient, avec le Parlement, les textes législatifs proposés par la Commission européenne. La présidence du Conseil est confié à un Etat membre différent tous les six mois; c’est ce qu’on appelle la présidence tournante. A la fin de ces six mois, le Conseil adopte une série de textes non contraignants, appelés “conclusions”, portant sur une série de sujets abordés durant cette période.
Bien que non contraignantes, les conclusions du Conseil donne une idée de sa position sur un sujet donné, qui préfigure l’orientation de l’action publique européenne dans ce domaine. En effet, la Commission européenne, qui est à l’initiative des lois, prend en compte la position exprimée par le Conseil de manière à fluidifier les négociations en amont de l’adoption du texte.
La Commission européenne avait annoncé la création d’un label “bien-être animal” européen sur les denrées alimentaires dans le cadre du Pacte Vert dans le secteur agro-alimentaire – désignée sous le nom de “stratégie de la ferme à table ». L’Allemagne avait alors exprimé sa volonté d’avancer sur ce dossier pendant sa présidence du Conseil, qui s’est déroulée de juillet à décembre 2020 (voir billet précédent). Sans surprise donc, le Conseil a adopté des conclusions sur ce sujet. Toutefois, ces conclusions peinent à donner une direction à la politique européenne tant elles sont générales, voire contradictoires.
Une marche à suivre incertaine
Label ou étiquette?
Sur le format tout d’abord. Le texte évoque alternativement la mise en place d’un label et d’un “système d’étiquetage à plusieurs niveaux (point 12), deux termes qui renvoient à un format et un mode de réglementation différent. Le label, généralement volontaire, est compris comme signalant au consommateur les produits de qualité seulement, à l’instar du label bio ou encore du Label Rouge. Typiquement, au niveau européen, la mise en œuvre de ce type de mesures se fait par la réglementation sur les signes de qualité.
Au contraire, l’étiquetage renvoie à une information délivrée de manière systématique sur tous les produits, indépendamment de leur niveau de qualité. Le système d’étiquetage invite donc à une segmentation des niveaux de qualité1, ce à quoi le label se prête moins2. Dans le cas de l’étiquetage, la réglementation au niveau européen passera plutôt par les règlements sur les normes de commercialisation, à l’image de celles existant pour les œufs coquilles, qui exigent notamment l’étiquetage du mode d’élevage.
Quel champ d’application?
Une deuxième incertitude concerne le champ d’application de ce label-étiquette bien-être animal et la portée de ses critères. Sur le champ d’application, le Conseil semble indiquer que la mesure concerne le « plus grand nombre possible d’animaux producteurs de denrées alimentaires” (point 6). A priori, il ne sera donc pas question d’étendre la mesure aux animaux élevés pour leur cuir, fourrure, laine ou plumes. Cependant, la question se pose quant à la faisabilité de certifier le niveau de bien-être des animaux élevés pour leur lait ou celui des animaux aquatiques qui ne font pas, pour l’heure, l’objet d’une législation spécifique en matière de bien-être animal.
Sur la portée des critères de ce label-étiquette, le Conseil semble se prononcer en faveur de l’intégration de l’ensemble des étapes de productions, y compris le transport et l’abattage (point 12 (d)). Sur ce dernier point, il faut espérer que la question du niveau de protection de l’animal au moment de sa mise à mort ne se cristallisera pas sur la question polémique de l’étourdissement. En effet, la création d’un “label bien-être animal” européen présente l’opportunité d’inscrire l’étiquetage du mode d’étiquetage dans une perspective davantage systémique et inclusive, par la prise en compte de la distance entre le lieu d’élevage et l’abattoir, englobant ce faisant la question du transport3.